Mardi 22 Mai, mercredi 23 Mai et Jeudi 24 Mai
C’est le jour du départ. Ma coéquipière est partie tôt ce matin vers 6 heures. Comme mon bus ne partira qu’à 11 heures, je prends une dernière douche car pendant les 3 jours du voyage retour, la toilette va se réduire à la plus simple expression. Après avoir déjeuné, je flâne encore un peu dans la chambre, vérifie les sacs qui iront dans la soute et ceux qui resteront avec moi et vers 10 heures, je me dirige vers la gare routière que j’avais repérée la veille. Il y a déjà quelques personnes qui attendent. Vers 11h20, un tout petit bus arrive. J’ai de la chance de tomber sur une dame roumaine parlant bien le français qui va jusqu’à Bordeaux. Elle m’aide pour les formalités et m’apprend qu’il nous faudra changer de bus dans 400 kilomètres. Aucun problème pour mettre le vélo (qui n’a pas été démonté) dans la remorque et on part. La vingtaine de places du bus sont toutes prises et il se dirige vers Timisoara. Il pleut et pourtant le chauffeur se permet de téléphoner en conduisant et de prendre quelques risques pour doubler sur cette route humide. Comme les passagers plaisantent, je suppose que ce doit être normal…. Soixante kilomètres avant Timisoara, vers Lugoj nous changeons de bus .Celui ci est beaucoup plus grand, plus confortable et prévu pour faire de longs trajets. Il y a déjà une vingtaine de passagers qui ont pris le bus à Bucarest et seulement 4 ou 5 personnes du petit bus montent à son bord. Il pleut fort et le temps d’aider à transférer mon vélo, je suis trempé. Par expérience, depuis Compostelle, je choisis une place où il n’y a personne à côté de moi comme cela, je pourrai un peu m’étirer et me détendre pendant la nuit.
Lors du changement de bus, j’ai assisté à une scène qui m’a outré. Un homme a frappé plusieurs fois sa femme enceinte devant ses enfants. Elle s’est retrouvée à terre et personne n’a rien dit ni bougé. Elle pleurait sur un banc devant ses enfants penauds. Je me sentais coupable de ne pas intervenir mais sont-ce les mœurs et les coutumes de ce pays? Je ne le crois pas mais la Roumanie fait partie de l’union Européenne et doit prochainement changer de monnaie pour accéder à l’euro. Je me pose alors la question : ses habitants sont-ils prêts à une intégration complète? Ont-ils l’envie de quitter leurs vieilles habitudes héritées du passé?
Arrêt bref à Timisoara puis nous repartons vers Arad que nous atteignons sous une forte pluie. Certaines rues sont inondées et des pompes ont été installées pour faire baisser le niveau de l’eau. Vers 19 heures nous arrivons à la frontière hongroise. Contrôle des papiers mais sans fouille. Cela à duré quand même 30 minutes. Le douanier a pris tous les papiers des ressortissants roumains et m’a laissé le mien. La nuit arrive peu à peu et soudain, le bus s’arrête sur le bord de la route repart et s’arrête de nouveau dans une station service. Les chauffeurs enfilent leur habit de mécano et se glissent sous le bus. Apparemment il perd de l’eau. Après 30 minutes, il repart. Dans la nuit, nous passons Budapest et nous nous dirigeons vers l’Autriche. Au petit matit matin, nous sommes encore sur le sol autrichien mais d’après les panneaux routiers, nous nous dirigeons vers Trieste en Italie. Le brouillard s’est levé, il devient de plus en plus intense et oblige le bus à ralentir fortement. La douane italienne est passée sans encombre et on délaisse la direction de Trieste pour celle de Venise. Il ne pleut plus mais le temps est orageux. La route est encore détrempée par la pluie de la nuit. Vers 8h30 nous traversons Padoue et enfin nous nous arrêtons à l’agence du bus (Atlassib) où l’on peut déjeuner dans une sorte de cantine. Le bus est parti vers l’atelier et reviendra 40 minutes plus tard apparemment réparé. Vers Vérone, le soleil montre timidement le bout de son nez et nous prenons la direction de Milan puis Bologne. Vers 15 heures, le bus s’arrête de nouveau, les chauffeurs semblent préoccupés mais on repart. Va-t-on pouvoir aller jusqu’au bout avec ce bus? On passe la frontière française sur l’autoroute puis laissons Monaco derrière nous. Nous devons traverser Nice complètement pour déposer quelques personnes à la gare. On n’avance pas et quand on roule, c’est au pas. Pour faire 2 ou 3 kilomètres dans la ville le bus mettra 1 heure 15. Il fait maintenant très beau et chaud, seuls quelques petits nuages parsèment le ciel. On est en avance sur l’horaire prévu. Nous passons Toulon puis à Marseille nous traversons la ville pour aller à la gare St Charles. Pendant le voyage, j’ai lié connaissance avec un intellectuel roumain qui parle français. En effet pendant l’ère du précédent dictateur roumain Ceausescu, il avait été condamné à mort pour ses pensées et avait rejoint Bordeaux où il avait de la famille. Comme nous parlons français, un homme se joint à nous. Il est de nationalité française, rentre de Roumanie où il a laissé sa femme qui est roumaine. Pour ne pas lui faire perdre son emploi d’enseignante, il fait le trajet deux fois par mois, en attendant de vivre définitivement en Roumanie dans un an ou deux. Il habite vers Marseille et nous quittera donc ici. Dommage, c’était une personne très sympathique. Notre avance sur l’horaire prévu est considérable, plus de 5 heures. Je devais être à Nîmes vers 4 heures du matin et prendre le premier train en direction d’Alès vers 6 heures mais il va falloir que je révise mon programme. Je ne me vois pas attendre 5 ou 6 heures dans la gare probablement déserte. Et en plus, j’apprends que la ville de Nîmes est en fête, c’est la féria. Pendant une semaine, c’est la folie : plus de deux millions de personnes débarquent dans la ville. Le chauffeur qui ne le savait pas refuse de traverser la ville. De toute façon, toutes les rues sont fermées à la circulation. J’envisage de me faire déposer au péage de l’autoroute où l’on viendra me chercher. On verra bien …. pour le moment on fait un crochet par Avignon, je ne comprends pas pourquoi aucune personne ne descend car d’après nos tickets, les conducteurs savent bien où doivent s’arrêter les passagers. Je téléphone à la maison, le chauffeur étant d’accord de me déposer à la sortie de l’autoroute à Nîmes. On a perdu un peu de l’avance en allant vers Avignon et il est 1 heure du matin quand le bus s’arrête. Un petit au revoir aux passagers qui se dirigent vers Bordeaux, remerciements aux chauffeurs puis je prends mes sacs, mon vélo et me dirige vers le premier carrefour ou l’on doit venir me chercher. Un peu avant deux heures, ma fille et ma femme arrivent et nous partons tous pour Alès. Ce coup ci, le voyage est vraiment terminé, la boucle est bouclée et il va falloir se réhabituer à la vie quotidienne.
Deux mots sur la compagnie de voyage Atlassib : rien à redire, il y avait deux chauffeurs qui se relayaient et en plus une personne qui s’occupait des bagages et des passagers. Le bus est très confortable, la soute à été transformée en chambre pour les conducteurs qui peuvent ainsi se reposer correctement. Toutes les affaires des voyageurs vont dans une grande remorque couverte tirée par le bus. Les chauffeurs connaissent parfaitement leur itinéraire et même comme dans Marseille où il y avait des travaux, n’ont pas hésité pour prendre le meilleur chemin. Les pauses ont été régulières ce qui permettait de sortir du bus pour se détendre un peu ou d’acheter quelques victuailles. Seul inconvénient, il est difficile de communiquer avec le personnel roulant car il ne parle que le roumain et très peu l’anglais. Mais il y a toujours quelqu’un qui peut servir de traducteur… on ne peut pas tout demander. Je recommande cette compagnie pour son professionnalisme. Bravo, surtout que le prix du trajet retour n’a été que de 120 euros.